LE « RÉSEAU CITOYEN » VA-T-IL LÂCHER PIOLLE ?
Le Réseau Citoyen est une composante méconnue de la majorité d'Eric Piolle au conseil municipal. Et les tensions n'ont jamais été aussi vives entre ce "réseau" et le Maire de Grenoble.
UN RÉSEAU FAUSSEMENT CITOYEN MAIS VRAIMENT DE GAUCHE
Aux origines, on retrouve le mouvement "GO Citoyenneté", officine de gauche locale composante de la majorité de Michel Destot à partir de 1995. En 2008, emmenés notamment par Pascal Clouaire, une partie des membres de GO quittent la majorité avec qui ils sont en désaccord. Ils fonderont dans la foulée "Démocratie Citoyenne"...
... QUI S'EST STRUCTURÉ AVEC ET POUR ERIC PIOLLE
... qui ne fait rien pendant plusieurs années et ressurgit en 2012 sous le nom de "réseau citoyen". Le mouvement a effectivement tout d'un réseau mais rien de vraiment "citoyen" : il se restructure et suit les orientations des Verts locaux qui préparent les municipales, avec un certain Eric Piolle en tête. Une mobilisation fondatrice pour le réseau est par exemple celle de la lutte pour le lycée Mounier au début des années 2010, à laquelle participent Kheira Capdepon, Alain Denoyelle (tous deux rejoindront le réseau citoyen)... et Eric Piolle. Dans sa lettre de démission, l'ancien "deuxième cerveau" d'Eric Piolle, Enzo Lesourt, cite la lutte pour Mounier au rang des manières "d'imposer les nouveaux termes du débat public" pour que les Verts gagnent Grenoble en 2014. On fait mieux comme simples "citoyens"...
L'ARNAQUE "CITOYENNE" À PLEIN POT
... mais les Grenoblois attentifs à l'actualité locale le savent bien : ce terme employé dans la bouche des hommes politiques cache trop souvent des personnalités et officines de gauche qui visent à légitimer des combines politiciennes grâce au vernis d'une (fausse) indépendance. L'exemple des "conseils citoyens indépendants" représentés par un cadre d'EELV, Guillaume Laget, a abondamment été dénoncé par notre collectif. Mais lors du mandat 2014/2020, le réseau citoyen a également été utilisé pour de pareilles fumisteries : sa directrice, Béatrice Bonacchi a ainsi été interviewée dans le magazine de propagande municipale Gre.mag pour exprimer sa reconnaissance à Eric Piolle au nom des "citoyens" qui auraient désormais droit à la parole grâce à lui (!). Elle était aussi porte-parole des Grenoblois (!) aux "assises citoyennes" organisées par la municipalité en 2016. Plus c'est gros, mieux ça passe.
DE 8 ÉLUS À 4 ÉLUS
Après avoir participé aux instrumentalisations de mobilisations locales aux côtés des Verts, le Réseau (faussement) Citoyen a très logiquement rejoint la liste d'Eric Piolle en 2014. Il s'était ainsi vu offrir 8 postes d'élus lors du premier mandat. Ils n'en comptent aujourd'hui plus que 4 pour ce mandat, signe de l'amorce de leur disgrâce auprès de Son Éminence Piolle qui n'en avait plus besoin pour gagner. Les heureux élus sont Pascal Clouaire, Amel Zenati, Kheira Capdepon, Djamel Wazizi.
LE BURKINI ET L'EXPLOSION DES TENSIONS
Pascal Clouaire était adjoint lors du précèdent mandat et ne l'était plus dès le début de celui-ci. Mais les tentions Piolle / Réseau Citoyen ont vraiment explosé avec le burkini. Pascal Clouaire n'a ainsi pas hésité à participer à une réunion publique anti burkini expliquant qu'ils n'avaient pas été élus pour ça et manifestant son opposition. Lors du conseil municipal, Amel Zenati, visiblement émue, avait ensuite ouvert le bal des élus de la majorité opposés au burkini. "Nous ne sommes ni des islamophobes, ni des laïcards, pas vulnérables à la lepenisation des esprits", avait-elle lancé en référence à Eric Piolle à ses déclarations habituelles pour disqualifier ses opposants. Dans un long discours (à priori écrit par Pascal Clouaire et/ou le LFI anti burkini Alan Confesson selon nos sources), Amel Zenati avait détaillé, point par point, l'hérésie que constitue cette revendication. Renvoyant en creux Eric Piolle et sa poignée d'élus communautaristes dans les filets.
KHEIRA CAPDEPON ET LA PRESSION DU SYSTÈME PIOLLE
Kheira Capdepon, adjointe en charge des ainés, a été plus sensible à la pression : elle aurait ainsi voté pour le burkini après avoir été convoquée par Eric Piolle pour la faire changer d'avis, alors qu'elle était contre. Le Maire de Grenoble (qui avait aussi convoqué Amel Zenati, sans succès) n'avait curieusement pas convoqué Pascal Clouaire : considérerait-il que les femmes sont plus facilement impressionnables ? K. Capdepon est ainsi passée entre les gouttes alors que les anti burkini de la majorité ont depuis été mis à l'écart, ostracisés de la majorité.
REBELOTE AVEC LE PALAIS DES SPORTS
Quelques mois après le burkini, nouvelle passe d'arme plus feutrée au sein de la majorité Piolle à propos du Palais des Sports. L'adjoint au commerce Maxence Alloto et le Vice-Président à la culture de la Métro Pascal Clouaire n'arrivant pas à s'entendre au sujet du devenir du Palais des Sports (il faudrait 50 millions d'euros minimum pour sauver cet équipement et la ville n'a évidemment pas le premier sou). Le premier expliquant qu'il faudrait que l'équipement soit reconnu d'intérêt métropolitain... le second répliquant que ce n'est pas à l'ordre du jour. Le tout par voie de presse. Ambiance.
LA HAUSSE D'IMPÔTS NE PASSE PAS
Plus récemment, c'est à l'occasion de la hausse d'impôts historique (+25%) que le Réseau Citoyen a encore montré ses distances avec le système Piolle. Dans un courrier adressé au Maire et finalement rendu public dans la presse, le Réseau explique que cette décision "perçue comme dure, peut provoquer une réaction négative qui s’ancre à long terme". Ils redoutent les "conséquences sur une partie très significative des contribuables grenoblois – qui bien que propriétaires ne sont pas tous « des riches » – et par incidence des locataires, qui nous alertent depuis peu. Nous doutons que cette décision, soit juste, équitable et efficace". Soit des arguments qui ont été portés par l'Opposition et balayés d'un revers de main par Eric Piolle et de son clan resserré ! Le jour de la parution de l'article dévoilant le courrier, le Maire de Grenoble et Pascal Clouaire ont été aperçus enfermés dans une salle en marge du conseil métropolitain, le premier faisant la leçon au second. Comme une tentative de recoller les morceaux de sa majorité fragilisée, qui pourrait se fracasser sur le vote du budget.
LE "RÉSEAU" S'ATTAQUE AUSSI À C. FERRARI...
Quelques jours après la révélation du courrier (une manière d'équilibrer après l'estocade à Piolle ?), le Réseau Citoyen s'en prenait sur Twitter... à Christophe Ferrari à propos du centre commercial Neyrpic : "En 2023, Grenoble Alpes Métropole sera en tête dans le palmarès de l'aménagement commercial le plus irresponsable en France ! #Neyrpic Merci @cferrari_38 @DavidQueiros38". On notera qu'ils ne citent pas le projet d'extension de Grand Place, qui concerne encore plus directement la ville de Grenoble.
... ET MET 3 CARTONS ROUGES AU SYSTÈME PIOLLE !
À Clément Chappet (Opposition) qui leur faisait remarquer que Pascal Clouaire est Vice-Président de ce même Christophe Ferrari, le Réseau a alors répondu que "Nous avons toujours été clair sur trois points : 1. Nous ne cautionneront jamais les extensions des centres commerciaux, 2. le greenwashing autour de l'#A480 et 3. des manquements déontologiques d'élus". Alors que C. Chappet leur rappelait que leurs élus appartiennent à des majorités qui n'ont pas respecté ces 3 points, ils ont simplement répondu... "Trouvez une alternative !". Ils ne nient donc pas du tout les manquements du système Piolle (qui a laissé faire des extensions de centres commerciaux, s'est couché pour l'A480 et pose des problèmes de déontologie avec les affaires qui l'entourent). Mais ils ne le quitte pas car il n'y aurait pas d'alternative (!), comme si il fallait absolument rester dans la majorité alors qu'ils pourraient claquer la porte pour être en phase avec leurs convictions.
COMBIEN DE TEMPS L'ATTELAGE TIENDRA-T-IL ?
Quoi qu'il en soit, ce triste attelage ne s'entend plus. Que ce soit pour des sujets aussi important que celui du burkini, qui conditionne en creux la société que nous entendons bâtir. Ou pour des sujets comme celui des finances, qui conditionne l'avenir de Grenoble et les marges de manœuvres de la collectivité. Ils ne font même plus l'effort de nier que le système Piolle a manqué aux engagements pour lesquels le Réseau Citoyen l'a rejoint. La seule question qu'il reste à se poser pour ces "citoyens" est donc la suivante : qu'attendent-ils pour quitter cette majorité et marquer leur opposition à ces pratiques et décisions qu'ils ne cautionnent pas ? Les 4 élus du Réseau ont une occasion toute trouvée d'exprimer leur désaccord avec le vote du budget le 13 mars. Les Grenoblois pourront ensuite tirer toutes les conséquences du vote des uns et des autres.