HAUSSE D’IMPÔTS : LA CHARGE DES GRENOBLOIS ET DE L’OPPOSITION

Le conseil municipal d'hier, avec le débat sur les impôts, a été mouvementé et s'est achevé près de 1h du matin. Petit récit d'une de ces grandes soirées que peut réserver le conseil de Grenoble.

ALAIN CARIGNON OUVRE LE BAL

Dès le début du Conseil, le Président du Groupe d'Opposition Alain Carignon a posé une longue question orale (la dernière qu'Eric Piolle autorise en début de conseil, car la liberté d'expression de l'opposition le gêne). Il a dénoncé cette volonté Piollesque d'invisibiliser ses opposants, puis tout de suite mis les pieds dans le plat en s'attaquant à la hausse d'impôts que souhaite Eric Piolle.

2008/2023 : LE GRAND RENIEMENT DES VERTS

Alain Carignon a commencé par énoncer de nombreuses citations du groupe d'élu EELV en 2008, alors qu'ils s'opposaient à la hausse d'impôts de 9% proposée par Michel Destot : Nous sommes totalement opposés à une augmentation des taux parce qu’il est parfaitement possible de construire ce budget différemment" / “Augmenter les taux des impôts est la pire des solutions. Les habitants sont pénalisés par la crise, ils vont être pénalisés par votre majorité, c’est en quelque sorte la double peine” / “Vous vous étiez engagé durant la dernière campagne électorale à ne pas augmenter les impôts” / “Nous allons battre tous les records en nous détachant même de la deuxième ville du palmarès parmi les villes de plus de 100 000 habitants" / “En cette période de crise, la Ville devrait faire un effort de sobriété dans sa politique de communication” / “Quant au débat public et démocratique, il a été particulièrement inexistant avant ! Lorsque les promesses électorales sont reniées, les habitants doivent être consultés sur ce changement de politique”. Soit autant de critiques parfaitement d'actualité, que les verts d'aujourd'hui (certains d'entre eux étaient déjà élus dans le groupe à l'origine de ces citations, comme l'apparatchik Olivier Bertrand) feraient bien de s'appliquer alors qu'ils souhaitent une augmentation de 25%.

Olivier Bertrand, ici à droite de Raymond Avrillier. Il était déjà élu en 2009 et critiquait vertement la hausse d'impôts de 9% de Michel Destot.

LES FAUSSES EXCUSES D'ERIC PIOLLE POUR JUSTIFIER LA HAUSSE

"Vous avez commencé par vous abriter derrière l’inflation, la crise énergétique dont les Verts sont les principaux responsables avec leur phobie du nucléaire, mais on se demandait pourquoi toutes les villes de France qui la subissent n’augmentaient pas leurs impôts de 32 % ?  Pourquoi Grenoble prend la tête des grandes villes pour l’impôt ? Après, vous êtes laborieusement passé à la démonstration que grâce à la suppression de la taxe d’habitation et de la redevance TV, malgré votre hausse massive, les Grenoblois seraient gagnants. Mais c'est faux. Puis vous êtes passé à « l’accélération des transitions », le réchauffement climatique, le GIEC en pensant que le climat de peur que vous faites régner sur les nouvelles générations ferait passer la pilule". 

"IL N'Y AURA AUCUNE AMPLIFICATION DE QUOI QUE CE SOIT"

"Enfin, ces derniers jours, un vent de panique vous a saisi. Le prix des cantines va baisser, les musées vont être presque gratuits, les taxes foncières de ceux qui ne peuvent pas payer vont être remboursés, le lac de Villeneuve va surgir, vous n’allez plus détruire d’immeubles à Villeneuve, le tout appelé sans cohérence mais ça fait bien : «  bouclier écologique et social ». Je dis panique à bord puisqu’aucune de ces mesures n’a été discutée nulle part, soumise à une commission, ne figure vraiment dans votre document d’orientation budgétaire de 65 pages. La vérité vous la connaissez bien. Vous augmentez les impôts pour éviter la mise sous tutelle et tenir jusqu’en 2026. Il n’y aura aucune accélération, aucune amplification de quoi que ce soit." 

L'EXPLOSION DES CHARGES DES LOCATAIRES ACTIS

"Pendant que vous discourez sur un prétendu “bouclier social”, les locataires d’ACTIS, bailleur social présidé par vos élus, vont subir une forte augmentation des charges, quelques mois après en avoir déjà subi une. Pour un T3, la hausse représente parfois jusqu’à 600 euros par an. Où est-il, votre bouclier social pour ces familles ?"

LE BOUCLIER ÉCOLOGIQUE : ÉTEINDRE TROIS LAMPADAIRES ?

"Quant au “bouclier écologique”, je vous suggère d’aller essayer cet élément de langage auprès des riverains qui vous ont interpellé à propos de l’éclairage du Parc Condé. Vous refusez de rallumer trois lampadaires dans ce parc, privant les enfants de jeux le soir pendant tout un hiver au nom des économies d’énergie. Je me mets à la place de ces parents à qui vous expliquez, au sortir d’une année capitale verte qui n’a permis aucune avancée en matière d’écologie, et à la veille d’une hausse d’impôts historique, qu’il faut absolument maintenir ces trois pauvres lampadaires éteints".

"VOUS AVEZ ENDETTÉ GRENOBLE PLUS QUE JAMAIS DANS SON HISTOIRE"

"Par contre vous avez endetté Grenoble en 2022 plus que jamais dans son histoire, en 2023 on commence à payer l’augmentation de vos mauvais choix de taux variable qui augmentent la dette et vos emprunts asphyxient la ville pour les 20 prochaines années. C’est cela que vous allez laisser aux générations futures, pas vos discours prétentieux et fumeux. Deux ans après votre arrivée, après avoir joué la cigale, n’avoir aucunement changé de braquet en succédant à la municipalité Destot, n’avoir pas même vu que l’augmentation d’impôts de 9 % de 2008 avait déjà été absorbée par le fonctionnement, vous avez continué. Au bord de la mise sous tutelle en 2016, déjà dans la panique vous avez imposé ce plan de redressement ridiculement comptable, tristement anti social pour tenir jusqu’en 2020. Aujourd’hui c’est la même panique, c’est la même impréparation".

Alain Carignon hier pendant sa question orale.

"VOUS ENGRANGEZ LES RECETTES DU SIÈCLE"

"Vous augmentez les impôts et la dette comme jamais au moment où vous engrangez les recettes exceptionnelles du siècle. Vous vendez les bijoux de famille amassés par des générations de Grenoblois. D’abord GEG, qui fait entrer par sa vente 30 millions d’euros dans les caisses des Grenoblois. Vous voulez vendre Grenoble-Habitat dont vous espérez désormais 34 millions d’euros et la Compagnie de Chauffage pour 11 millions d’euros. Un pactole de 75 millions d’euros qui ne tombera pas deux fois dans les caisses de la ville puisque c’est le fruit du travail et de la volonté de municipalités depuis 50 ans, que vous dilapidez, qui ne sert à rien, ni à nous désendetter, ni à réaliser des investissements patrimoniaux, ni à améliorer le quotidien des Grenoblois".

IL EXISTE POURTANT DES SOLUTIONS

"La priorité serait de s’attaquer aux dépenses de fonctionnement. Dans son rapport de 2018, la chambre régionale des comptes soulignait déjà la nécessité de maîtriser les charges de personnel de la collectivité, pointant qu’elles étaient supérieures à la moyenne des collectivités de la même strate. Loin de l’avoir fait, nous porterions cette masse salariale à 156,8 millions d’euros en 2023. Soit 56% des dépenses de fonctionnement. Vous empilez, vous gonflez le haut de la pyramide municipale, vous avez raté toutes les potentialités de mutualisations avec la création de la Métropole, vous gonflez les dépenses de communication et dans ce même Conseil Municipal vous osez proposer l’embauche d’un chargé de com’ supplémentaire, alors  que vous en comptez déjà 18 !"

INDEMNITÉS DES ÉLUS : +17% PAR AN PAR RAPPORT AU PRÉCÈDENT MANDAT

"Je vous signale que vous n’avez pas tenu non plus la promesse de ne pas augmenter la masse des indemnités des élus. Pour satisfaire tout le monde vous avez créé une armée mexicaine puisque votre majorité ne compte plus que 3 conseillers "de base", des malheureux punis, compte 22 adjoints et au bout du compte le budget des indemnités des élus augmente de 17 % par an soit en fin de mandat près de 900 000 € supplémentaires. Est-ce bien raisonnable de se servir dans une ville exsangue financièrement ?" 

RIEN POUR LE PATRIMOINE

"Des dépenses de fonctionnement, de communication, mais toujours rien pour « adopter une stratégie de gestion du patrimoine » que vous demandait la Chambre Régionale des Comptes. Vous avez même supprimé l’adjoint au patrimoine. Ni vos recettes d’impôts, ni vos recettes exceptionnelles ne seront affectées aux 20 millions que l’ex musée-bibliothèque de la place de Verdun attend pour être sauvé, ni aux 50 millions dont le Palais des sports aurait besoin selon vos propres rapports cachés". 

"ALLEZ-VOUS PERSISTER DANS CETTE PENTE DE FACILITÉ ET DE LÂCHETÉ ?"

"A l’heure du choix des orientations budgétaires de la ville, Monsieur le Maire, allez vous persister dans cette pente de facilité et de lâcheté qui au final interdirait d’avenir notre ville, ou bien, comme nous vous le proposons, acceptez vous d’engager un débat avec les Grenoblois et avec les oppositions, comme vous l’aviez aussi promis dans vos engagements, sur des budgets alternatifs, avec des réformes de structures qui permettent d’éviter cette augmentation massive d’impôts et de la dette ?". Évidemment, Eric Piolle est resté arc-bouté sur sa hausse d'impôts et a tout fait pour perturber la question orale d'Alain Carignon, gêné par des éléments qui ne figuraient pas dans la version écrite envoyée la semaine dernière (chaque question de l'opposition doit être envoyée 4 jours avant pour que son cabinet lui rédige une réponse...), alors que lui-même n'a pas hésité entre temps à multiplier les conférences de presse et déclarations médiatiques soulevant de nouvelles interrogations !

LES GRENOBLOIS APPORTENT DES CENTAINES DE VOEUX ET DOLÉANCES

A 17h30, tous les élus du groupe d'Opposition (Alain Carignon, Nathalie Béranger, Brigitte Boer, Chérif Boutafa, Nicolas Pinel, Dominique Spini) ont demandé une suspension de séance et se sont vus accorder 15mn par le Maire pour aller à la rencontre des Grenoblois présents devant le conseil. Sur les 4 manifestations programmées hier après-midi (les autres à l'appel des salariés de Grenoble Habitat, de Grelive et du Droit au Logement), cette mobilisation à l'appel de l'Opposition est celle qui a attiré le plus de monde. Plusieurs dizaines de Grenoblois ont ainsi amené et brandi des centaines de vœux et de doléances notés sur des "tuiles" en carton, à destination d'Eric Piolle.  Après un temps d'échange avec les participants et la presse, les élus d'Opposition sont ensuite retournés au conseil municipal qui redémarrait pour porter ces doléances au Maire.

BRIGITTE BOER : "VOTRE ARGUMENTAIRE NE RÉSISTE PAS AU RÉEL"

Tous les élus du groupe d'opposition se sont alors exprimés pour dénoncer véhément le projet d'augmentation d'impôts. Brigitte Boer a ouvert les hostilités en battant en brèche la justification de Piolle selon laquelle la suppression de la taxe d'habitation et de la redevance TV par le gouvernement compenserait sa hausse de taxe foncière : "je peux vous donner le cas d’une personne, seule avec un enfant, qui payait 225€ de taxe d’habitation en 2018, et qui de 2022 à 2023 va voir sa taxe foncière augmenter de plus de 500€, avec un taux qui va passer, en tout, de 63,03% à 76,18%, plus l’augmentation de 7% des bases, soit une augmentation de plus de deux fois le montant de l’ancienne taxe d’habitation !... Désolée, mais votre argumentaire ne résiste pas au réel ! Si j’en crois le rapport de l’INSEE, de 2013 à 2019, il y a déjà eu 1000 propriétaires de moins à Grenoble… On peut imaginer qu’avec cette augmentation monstrueuse, l’hémorragie va s’amplifier"…

NICOLAS PINEL : "VOUS ALLEZ DÉPOUILLER LES GRENOBLOIS"

Nicolas Pinel a enchainé en dénonçant le matraquage des classes moyennes et des plus modestes : "je ne parle pas de nantis, je parle d'ouvriers, d'employés qui se privent pour rembourser des emprunts immobiliers. J'ai une pensée toute particulière pour les retraités qui ne bénéficient que d'une faible pension, certains de seulement 700 euros par mois. Et vous allez les dépouiller, alors qu'ils subissent aussi l'inflation, la hausse de l'énergie, sans que leurs revenus augmentent !". Il a également révélé le pot aux roses du fameux "bouclier social" promis par Piolle : "vous annoncez que les propriétaires modestes pourront être soutenus par les dispositifs du CCAS. J'ai posé la question à Nicolas Kada, Vice-Président du CCAS. Sa réponse est que pour l'instant, il n'y a rien de prévu !". Une grande arnaque à la Piolle : annoncer quelque chose pour gagner du temps, réfléchir ensuite. La comm', toujours la comm', qu'importe les actes concrets derrière.

Le Groupe d'Opposition (au premier rang : Nicolas Pinel, Nathalie Béranger, Alain Carignon, Brigitte Boer / au deuxième rang : Dominique Spini / Chérif Boutafa)

DOMINIQUE SPINI : "LA VILLE NE SERA PAS PLUS SÛRE, PLUS PROPRE NI PLUS VERTE"

Dominique Spini a quant à elle démystifié l'argumentaire de la majorité selon laquelle cette hausse servirait à "amplifier les transitions" : "encore une expression fourre-tout, nébuleuse, de la comm' pour enfumer les Grenoblois. Ce dont nous sommes sûr, c'est que la ville ne sera pas plus propre, plus sûre, plus verte. Par contre, Grenoble passera n°1 des villes pour la taxe foncière avec cette augmentation démentielle. Vous nous sortez quelques gadgets du chapeau : gratuite des musées (elle est déjà effective presque partout), baisse du tarif de la cantine selon le coefficient (alors que vous l'avez augmenté lors du précèdent mandat). Avec 18 communiquants, vous avez effectivement de quoi endormir le gogo. Monsieur le Maire, je vous l'avais dis au moment du burkini, je vous le redis : vous ne méritez pas Grenoble. Vous n'êtes pas à la hauteur et ne l'avez jamais été".

CHÉRIF BOUTAFA : "AVEC QUI CE CHOIX A-T-IL ETE DÉLIBÉRÉ?"

Chérif Boutafa a de son côté rappelé la trahison de l'engagement de campagne et l'absence totale de concertation des Grenoblois : "cette décision d'augmentation, nous la contestons avec force et vigueur. En effet, après sa promesse de ne pas augmenter les impôts en 2014, le maire avait renouvelé cet engagement lors des élections municipales de 2020, sur une radio devant les autres candidats et les auditeurs Grenoblois. Aujourd’hui, vous êtes tout fier d’annoncer devant la presse sans sourciller et surtout sans honte que « la hausse de la taxe foncière est un choix délibéré ». Mais avec qui a-t-il été délibéré ? Pas avec les Grenoblois en tout cas, car il n’y a eu aucune concertation malgré un autre engagement de votre part. Par votre façon d’agir depuis 10 ans et vos mensonges, vous n’avez aucun respect pour Grenoble et ses habitants".

NATHALIE BÉRANGER : "QUI PAIERA VOTRE JUSTICE SOCIALE ?"

Enfin, Nathalie Béranger a listé les conséquences néfastes qu'aurait une augmentation : "vous allez décourager les familles qui veulent acquérir leur logement et devenir propriétaire, vous allez donc stopper le parcours des ménages qui veulent sécuriser leur avenir. Le taux de propriétaires habitants est déjà faible à Grenoble, vous allez accentuer cette tendance. Vous allez déstabiliser le marché de l'immobilier avec un recul certain des transactions et donc des baisses des droits de mutation  et un manque à gagner pour les collectivités. Vous n'allez pas maitriser l'augmentation du prix des loyers, les propriétaires répercuteront partiellement cette hausse sur les locations et vous ne pourrez l'empêcher. Vous allez appauvrir un peu plus les habitants en dégradant le revenu médian. Qui paiera votre justice sociale ? Qui paiera pour venir en aide aux familles les plus modestes ?".

L'OPPOSITION REMET LES DOLÉANCES DES GRENOBLOIS AU MAIRE...

Le Groupe d'Opposition a ensuite remis les doléances et vœux des Grenoblois sur le bureau du Maire. On trouvait tout types de messages parmi ces tuiles : des souhaits d'une ville plus propre, de davantage de volontarisme contre l'insécurité, de préservation des espaces verts face à la bétonisation rampante, et la dénonciation de nombreux maux grenoblois : l'absence du Maire et les affaires qui l'entoure, la gestion calamiteuse du parc locatif social, le mépris de la participation citoyenne, le traitement infligé aux associations, les prix de l'immobilier très bas par rapport aux autres villes comparables, la dévaluation des biens dans les éco quartiers, l'absence de mixité, les rodéos... Et bien évidemment de nombreuses tuiles contre la hausse d'impôts historique et pour dénoncer la gestion financière catastrophique.

... ERIC PIOLLE FUIT !

Plutôt que de recevoir les doléances, Eric Piolle s'est soudainement levé et a fui, refusant de réceptionner les tuiles ! Il a interrompu la séance et n'a pas daigné revenir avant que les cartons n'aient été débarrassés de son bureau. Tout un symbole : le Maire préfère la fuite plutôt que d'affronter les problèmes des Grenoblois. Un exemple criant du mépris d'Eric Piolle vis-à-vis de ses administrés, au cas où il subsistait des doutes sur la considération qu'il a à l'égard des habitants.

ALAIN CARIGNON ENFONCE LE CLOU : "UN BUDGET PLONGEOIR DANS UNE PISCINE VIDE"

Après le dépôt des tuiles, Alain Carignon a à nouveau pris la parole pour dénoncer "le budget tremplin qui est devenu un budget plongeoir dans une piscine vide". Il a rappelé que toutes les alertes et propositions de la liste société civile pour les municipales se trouvaient justifiées aujourd'hui : "nous étions seuls un peu seul il faut le dire, à dire qu'il était faux d'aligner les dépenses futures dans une ville exsangue, à dire que sans réformes de structure, sans véritable big-bang, sans plan d'économies, nous ne dégagerions pas les marges d'action pour agir sur le quotidien des Grenoblois , sur le renforcement des solidarités et sur la préparation de l'avenir. Ce n'est pas un épisode mais un évènement structurel qui confirme nos inquiétudes. Les Grenoblois devront demain plus qu'hier encore être attentifs aux marchands de rêve qui ne décriront jamais les moyens qu'ils devront mettre en oeuvre pour réaliser".

LIONEL PICOLLET : "JE PEUX ENFIN M'EXPRIMER SANS PEUR"

La charge n'était pas terminé. Car Lionel Picollet, élu démissionnaire de la majorité Piolle, a alors pris la parole pour sa première intervention en conseil, très attendue par beaucoup. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que sa liberté de parole a fait grincer des dents très fort sur les bancs de la majorité. "Je peux enfin m'exprimer sans peur", a-t-il donné le ton d'entrée. Avant de torpiller en règle le projet de budget municipal, qu'il connait bien puisqu'il a assisté à sa préparation en interne alors qu'il était encore dans la majorité. Quelques extraits : "le bouclier social annoncé ne compense ni l'inflation ni la crise énergétique" / "il semblerait que la majorité n'aime plus les contribuables car on leur avait promis qu'il n'y aurait plus de hausse d'impôts" / "cette mesure risque de provoquer l'exode des habitants vers des communes plus agréables" / "vous faites de nous un des champions des villes les plus taxées en France" / "ce n'est pas faute de l'avoir dit lors des réunions préparatoires : il existe une autre politique fiscale pour Grenoble sans abandonner la politique sociale" / "Elle nécessite de s'attaquer aux dépenses de fonctionnement, de partager les charges de centralité avec la Métropole, de booster la gestion du patrimoine foncier pour en réduire les coûts d'exploitation" / "On aurait pu économiser le coût du contentieux avec Richardson, ou ces dépenses étonnantes pour le 38 rue d'Alembert ou la villa Kaminsky" / "Vous préférez garder le cap dans une forme de dogmatisme" / “Personne ne doit s’étonner que Grenoble soit une ville de moins en moins attirante” / "Pensez-vous que les Grenoblois vont oublier cette décision aux prochaines élections municipales ?". Imaginez le choc sur les bancs de la majorité : l'un des leurs jusqu'à il y a peu en train de porter le même discours que celui tenu par le Groupe d'Opposition, faisant les mêmes constats et dénonçant les mêmes maux ! Eric Piolle s'est subitement assombri, la Première Adjointe Isabelle Peters ne tenait plus sur sa chaise, Lucille Lheureux était au bord de l'apoplexie et de (très) nombreux conseillers de la majorité regardaient leurs chaussures. 

Lionel Picollet hier pendant son intervention.

VINCENT FRISTOT NE CONVAINC PERSONNE 

Dans un ballet savamment orchestré à l'avance, le quarteron de fidèles d'Eric Piolle a ensuite lu ses fiches pour défendre l'indéfendable. L'adjoint aux finances Vincent Fristot, vieux pilier du système vert, a commencé. Il a encore justifié cette augmentation en se référant au rapport du GIEC (comme si le GIEC réclamait des augmentations d'impôts), et il a trouvé le moyen de remettre sur la table le mensonge de la "dette Carignon" (remboursée depuis plus de 20 ans alors que la "dette Piolle", elle, engage les Grenoblois pour les 20 prochaines années) ! Il a reconnu qu'une augmentation d'impôts de 17% aurait suffi à absorber l'inflation... mais que le reste était nécessaire pour financer un "programme structurant". Programme tellement "structurant" qu'il n'a été capable de citer que deux exemples : le "plan écoles" (qui brille par son retard et ses oublis), et la réhabilitation de la Villeneuve (qui est largement financée par l'État dans le cadre de l'ANRU). Quelle ambition.

NICOLAS KADA ET LE FANTASME DU "BOUCLIER SOCIAL"

Nicolas Kada, adjoint au social, a ensuite lu sa fiche pour tenter de défendre à nouveau le fameux "bouclier social". En énumérant des poncifs sans jamais préciser comment sera mise en oeuvre telle ou telle ambition. On aurait pu lui concéder une certaine honnêteté intellectuelle, quand il a lancé à l'adresse des oppositions : "ce qui nous distingue de vous, c'est qu'on a pas peur de recourir à l'impôts" (effectivement et c'est bien là tout le problème). Mais c'était pour aussitôt ajouter que “ça met en évidence notre attachement au service public”. Ce service public qu'ils ont commencé à démanteler avec le plan d'austérité en 2016, la poursuite de la fermeture de bibliothèques de proximité dans le nouveau plan lecture, le sabrage dans les aides aux MJC et aux associations d'éducation populaire... Qu'est ce que ce serait si ils n'y étaient pas "attachés" !

LUCILLE LHEUREUX LIT SES FICHES

Lucille Lheureux, adjointe "aux" cultures, a elle aussi lu ses fiches, concentré de verbiage aussi inodore qu'abscon sur "l'universalité de l'accès à la culture" et autres joyeusetés conceptuelles qui sont à 10 000 lieues de la politique réellement menée par ces élus. Malheureusement pour elle, elle a buté sur la première phrase et s'est immédiatement emmêlé les pinceaux, rendant trop visible le fait qu'elle lisait des éléments de langage rédigés par d'autres.

GILLES NAMUR OU L'INDÉCENCE FAITE HOMME

Enfin, l'inénarrable adjoint aux espaces publics Gilles Namur a clôturé le bal. Celui-là ne s'est pas embarrassé de pincettes et a immédiatement péroré des affirmations à mourir de rire tant elles sont en décalage : la ville de Grenoble aurait ainsi impulsé une “déminéralisation massive” (une déminéralisation bien visible sur la nouvelle place Victor Hugo...), et “jamais nos arbres n’ont été autant protégés dans l’espace public” (celle-là, il fallait un certain courage pour l'oser !). Il n'a évidemment pas résisté à faire un peu de politique politicienne bas de plafond, en considérant qu'en matière de mobilités, "depuis le début du mandat, on a malheureusement marqué une pause". Soit une nouvelle manière d'étriller le Président du SMMAG Sylvain Laval que ne digèrent pas les verts... dont le début de mandat a été marqué par le COVID, alors que le camarade de Namur et ex Président du SMMAG, Yann Mongaburu (EELV) a lui paralysé le territoire pendant 6 ans avec pas un seul km de tram supplémentaire !

ERIC PIOLLE NE REPOND A RIEN ET SE RENFERME SUR LUI-MÊME

Après avoir laissé ses adjoints réciter leur leçon, Eric Piolle a clos le débat pour passer à autre chose. Sans s'exprimer pour défendre cette hausse qu'il a imposé. Gêné par les doléances des Grenoblois, sonné par la charge de Lionel Picollet. C'est un Maire à la mine sombre, visiblement groggy, qui a ensuite expédié le reste du Conseil. 

Le fauteuil vide d'un Maire qui a fuit les doléances des Grenoblois. Triste symbole.

LE COMBAT CONTINUE

L'enseignement de cette soirée : Eric Piolle et sa majorité ont été touchés par l'opposition qu'ils ont rencontré avec cette proposition de budget. Mais le combat ne s'arrête pas là. Après le débat d'hier, le budget sera voté lors du conseil municipal de mars. L'Opposition appellera à nouveau à la mobilisation des Grenoblois d'ici là... et n'hésitera pas à poursuivre le combat sur le terrain judiciaire. A l'instar de la bataille contre le burkini, il est encore possible de faire plier Eric Piolle en empêchant cette hausse qui s'avérerait catastrophique pour Grenoble et les Grenoblois.

5 Comments

Laisser un commentaire

"LES INFORMÉS" : LES COULISSES DE LA VIE GRENOBLOISE !

X