GRENOBLE-HABITAT : LE DOSSIER DE VENTE À NOUVEAU SUR LE POINT D’EXPLOSER ?

Un nouvel épisode dans le dossier Grenoble-Habitat, qui semblait s'être calmé après avoir fait couler beaucoup d'encre pendant des années. Hier, Klauss Habfast, le Président du bailleur social (par ailleurs adjoint de Piolle et condamné pour favoritisme il y a deux jours !) a lancé une charge contre la métropole.

LE BRADAGE POUR RENFLOUER LA VILLE

C'est un dossier qui tourne en rond et qui ne tient qu'à une raison : le besoin qu'a Eric Piolle de renflouer les caisses de la ville après 10 ans de sa gestion financière catastrophique. Pour ce faire, il avait d'abord tenté de vendre les actions de Grenoble-Habitat, bailleur social historique détenu par la ville, à la métropole. En s'y prenant comme à son habitude avec toute sa subtilité et sa capacité de dialogue : il avait inscrit la recette attendue au budget primitif de la ville sans avoir un quelconque accord avec la métro...

LA TENTATIVE DE VENTE AU PRIVÉ ...

Suite au refus logique de Christophe Ferrari, président de la métro qui n'avait pas apprécié d'être mis au pied du mur par Son Eminence, ce dernier s'était alors tourné vers... le privé. Tant pis pour ses promesses électorales de préservation du logement public. Il avait, là encore en solitaire, malgré une très forte opposition des salariés et locataires, lancé une opération de cession du bailleur à une filiale privée de la CDC Habitat (Adestia), groupe national mastodonte. Adieu la proximité. 

Le projet de vente de Grenoble-Habitat a donné lieu à de nombreuses oppositions des salariés et des locataires. Ici le siège mis en "liquidation totale"..

... QUI CAPOTE

Là encore, la croisade piollesque avait capoté. En septembre dernier, la métropole, actionnaire minoritaire de Grenoble-Habitat, avait très largement rejeté le projet de vente à Adestia, tout comme la ville de La Tronche. En minorité politiquement, les Verts avaient subi le coup de grâce deux mois plus tard avec l'avis négatif rendu par le comité régional de l’habitat et de l’hébergement (CRHH). Et cet avis est quasi systématiquement suivi par le Ministère du logement qui doit valider la vente...

UN GROS COUP POUR LES FINANCES DE LA VILLE

Klauss Habfast, homme-lige de Piolle placé Président de Grenoble-Habitat, n'avait alors eu d'autre choix que de "mettre en pause" la vente au privé. Alors que les piollistes espéraient en tirer 37 millions d'euros, prévus au budget avec leur imprudence/incompétence habituelle, ils avaient dû contracter un énième emprunt astronomique, creusant la dette pour équilibrer les finances... la même année que la hausse d'impôts record : c'est dire où leur gestion nous a mené

LE RABIBOCHAGE AVEC LA MÉTRO ...

Ne connaissant pas la honte et visiblement pas au courant de sa position de faiblesse, Habfast avait alors écrit à Christophe Ferrari pour sommer la métro de présenter un projet de rachat en toute urgence. Le Président lui avait vertement répondu, dénonçant ces injonctions et cette forme de "vente à la criée"... mais il avait finalement rouvert la porte à un rachat des actions de la ville, annonçant la reprise des discussions suite à une rencontre avec Eric Piolle. 

L'une des (nombreuses) manifestations des salariés de Grenoble-Habitat devant le conseil municipal.

... AUX FRAIS DU CONTRIBUABLE

Début février, Ferrari avait formellement confirmé cette volonté de rachat et de recapitalisation, parlant de "dialogue extrêmement constructif" avec la ville, d'un accord sur 4/5 ans et de 12,5 millions d'euros prévus pour cela au budget 2024. Le contribuable métropolitain se substitue en quelque sorte au contribuable grenoblois pour renflouer les caisses de la ville : c'est une opération blanche avec l'argent public. 

UN RACHAT AUX MODALITÉS TRÈS FLOU

Quelques jours après au conseil métropolitain, et malgré la grande opacité de Piolle/Ferrari dans ce dossier, les premiers points problématiques se faisaient jour. Tandis que le camp du président de la métro se bornait à évoquer les 12,5 millions inscrits en 2024, Eric Piolle rappelait comme en guise d'avertissement que "le prix ne sera ni surévalué ni dégradé". Son objectif étant bien de percevoir les 52 millions d'euros correspondant à l'offre originelle de rachat de la CDC. On sentait déjà venir la pomme de la discorde...

VILLE ET MÉTRO PAS D'ACCORD SUR LE PRIX 

... et patatras : nous y sommes. Hier, Klauss Habfast, le président de GH placé par Piolle a donc pris la parole pour expliquer qu'il n'y a toujours pas d'accord et subitement qu'il y a urgence. Jean-Benoit Vigny, du Dauphiné, précise ce qui semble sans surprise être le nœud du problème : "les deux parties ne semblent pas non plus d’accord (du tout) sur le prix de l’action". Comme c'est surprenant.

LA MÉTROPOLE DOIT FAIRE 100 MILLIONS D'ÉCONOMIES...

"La Ville a déjà proposé, il y a quelques semaines, de repousser la vente car la Métropole a un problème d’argent" explique Habfast au DL. Le "problème" en question : elle doit trouver 100 millions d'économies sur ses investissements car exsangue financièrement. D'où la suspension de projets comme celui de la rue de Strasbourg, pour faire quelques économies... ou cette incapacité à aligner la somme demandée pour Grenoble-Habitat. Le mur financier est là et l'incapacité des élus roses/rouges/verts aux commandes à endiguer l'envolée folle des dépenses de fonctionnement et de la dette se paye aujourd'hui cher. 

Lors du dernier conseil métropolitain, le président du groupe société civile Alain Carignon dénonce la trajectoire budgétaire métropolitaine.

... DONC NE PEUT PAS S'ALIGNER AVEC LES ATTENTES DE LA VILLE

De fait, l'écart entre ce qu'attendent les Piollistes et ce que propose Ferrari est abyssal : Habfast explique qu'il faut minimum 15 millions de recapitalisation pour continuer à construire des logements sociaux, tandis que la Métro ne mettrait à ce stade qu'un prêt de 8 millions sur la table (où sont les 12 millions gravés dans le marbre il y a 4 mois ?). "Juste avec les taux d’intérêt, et sans parler du prêt qu’il faudra bien rembourser, c’est 300 000 € par an supplémentaires" ajoute le Président de Grenoble-Habitat. Dans une telle configuration, cela coûterait donc plus à la ville que ça ne lui rapporte ! 

4 MILLIONS MINIMUM À TROUVER EN URGENCE

Dans tous les cas, sans accord rapide, la ville va se retrouver à mettre la main à la poche puisqu'on découvre qu'il faut 4 millions d'euros pour assurer l'entretien du parc actuel. 4 millions qui ne sont évidemment pas budgétés et pourraient donner lieu à de nouveaux emprunts prochainement. On comprend pourquoi les Piollistes veulent se débarrasser du bailleur à tout prix : comme les opérations immobilières sur les zones d'aménagements que la ville renfloue à coup de millions, Grenoble-Habitat va contribuer à creuser le trou financier. Les Verts veulent bel et bien refourguer un cadeau empoisonné à la métro. 

PLUS DE LOGEMENTS SOCIAUX D'ICI 3 ANS ?

Autre conséquence possible de cette impasse : Habfast évoque "un plan de redirection" qui consisterait à finir les constructions en cours puis finirait par "une réduction drastique de la production de logements sociaux à partir de 2027, pratiquement à zéro !". Les Verts/LFI verraient alors leur promesse d'atteindre 30% de logements sociaux à Grenoble s'envoler définitivement. On ne se plaindra pas si ce cauchemar dystopique ne se réalise pas, vu les conséquences que cela entrainerait pour la qualité de vie des grenoblois (bétonisation, disparition de la mixité sociale...). 

VERS UN RETOUR DU SCÉNARIO DE VENTE AU PRIVÉ ?

"On a suspendu le projet avec CDC habitat, ça ne veut pas dire qu’il disparaît" lançait Eric Piolle au conseil métropolitain de février. Que se passera-t-il si aucun accord n'est trouvé avec la métro ? La ville de Grenoble tentera-t-elle vraiment de relancer le projet de bradage au privé qui est seulement suspendu ? Pour mettre la pression sur la métropole, Habfast fait d'ores et déjà mine de "demander" à Piolle (en réalité les consignes viennent de lui, le Président de GH n'étant que son pion) que le bailleur soit au service exclusif de la ville tant qu'il n'y a pas d'accord. Les coups de pression reprennent.

Hier, grève devant Grenoble-Habitat : la situation précaire du bailleur relance la contestation.

LE NUMÉRO DE CHANTAGE D'ÉRIC PIOLLE

Pour bien donner de l'ampleur au sujet, Eric Piolle lui-même en a remis une couche en s'exprimant hier après-midi devant les caméras du Dauphiné Libéré. "C'est l'heure de la clarté demain au conseil métropolitain", martèle-t-il, affirmant qu'il n'y a que deux choix à ses yeux : soit la métropole "met les moyens" soit il se tournera à nouveau vers la vente au privé. Pour achever son petit chantage, il explique que si la métropole refuse d'acheter et bloque la vente, il fera en sorte que Grenoble-Habitat ne contribue plus aux objectifs de réalisation du Plan Local de l'Habitat (PLH) et n'opère que sur Grenoble. 

HABFAST VEUT FAIRE OUBLIER SA CONDAMNATION

Les sorties d'Habfast/Piolle ne sont évidemment pas anodines. Ils ont dégainé au lendemain de la condamnation du premier pour favoritisme dans le cadre de l'attribution de marchés d'Alpexpo qu'il présidait par le passé (et a laissé dans un état catastrophique). Les piollistes sont fidèles à leurs méthodes : avec Grenoble-Habitat, ils rouvrent un dossier qu'ils savent polémique pour tenter de faire oublier la série des affaires qui mine la majorité municipale. 

LA FIN DE MANDAT S'ANNONCE EXPLOSIVE

Ce nouvel épisode a ceci de pitoyable qu'il oppose deux faces d'une même pièce. D'un côté la ville veut un accord de vente rapide car sa trajectoire financière bancale promet une nouvelle hausse d'impôts après les élections municipales si elle ne trouve pas de nouvelles recettes (les piollistes sont incapables de réaliser le moindre plan d'économie, ils en sont donc à brader les bijoux de famille). 

De l'autre, la métropole ne peut répondre aux exigences de la ville car elle est déjà confrontée au mur financier avec un trou de 100 millions qui l'oblige à rogner partout. La gestion commune des deux collectivités par les verts et leurs alliés depuis 30 ans leur explose à la figure. Incapables d'économies, ils ont laissé s'envoler les dépenses de fonctionnement. Incapables d'avoir appréhendé l'enjeu de la métropolisation pour mutualiser, ville et métro gesticulent aujourd'hui chacune de leur côté pendant que le contribuable s'apprête à trinquer. Et que les locataires de Grenoble-Habitat s'apprêtent à subir.

Une partie de la suite de cette tragicomédie s'écrira dès aujourd'hui, 10h, au conseil métropolitain où le sujet promet désormais de s'inviter dans les débats. Avant très probablement de rebondir et de rejoindre la longue liste des problèmes qui achèveront de faire exploser la fin de ce mandat.

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