COMMENT LES EX ÉLUS DE LA MAJORITÉ PIOLLE RENFORCENT L’OPPOSITION

Les 7 élus exclus de la majorité Piolle refont (un peu) parler d'eux alors qu'ils reviennent à la charge cette semaine sur le sujet de la taxe foncière.

UN GROUPE "D'OPPOSITION" QUI REVENDIQUE SA FILIATION À L'ADES

Laure Masson, Anouche Agobian, Maxence Alloto, Pascal Clouaire, Hakim Sabri, Barbara Schuman, Amel Zenati ont été exclus de la majorité Piolle en mars dernier après avoir émis de légers doutes à propos de la hausse d'impôts (qu'ils ont votée quand même). Ils ont formé un groupe baptisé “Grenoble démocratie écologie solidarité” en hommage à l'ADES (“Association démocratie écologie solidarité”) de Raymond Avrillier et Vincent Comparat, les parrains de la municipalité actuelle... Histoire qu'il n'y ait aucun doute sur leur positionnement.

Maxence Alloto, l'un des 7 exclus, au temps de la grande entente avec Eric Piolle qui lui remet son écharpe d'adjoint.

UNE CAMPAGNE CONTRE LA HAUSSE DE TAXE FONCIÈRE

Lors du conseil municipal de septembre, par la voix de Maxence Alloto (girouette qui a parcouru tout l'échiquier politique au gré de ses ambitions), ils s'étaient montrés particulièrements virulents à l'égard du Maire, en qui ils voyaient désormais "le Jérôme Cahuzac d'EELV", osant toutes les critiques après l'avoir suivi docilement pendant des années. Le groupe récidive en lançant désormais une campagne "de 12 000 tracts" contre la hausse de la taxe foncière.

LA REPRISE DES ARGUMENTS DU GROUPE D'OPPOSITION...

La campagne, dont le Dauphiné présente les grandes lignes, est la bienvenue puisqu'elle reprend des arguments du groupe d'opposition (Alain Carignon, Nathalie Béranger, Brigitte Boer, Chérif Boutafa, Nicolas Pinel, Dominique Spini), que nous avons régulièrement développé ici. Le tract fustige ainsi le mensonge du bouclier social et climatique ("la majorité n'a rien prévu"), l'absence de grands projets justifiant l'augmentation, l'injustice de cette mesure irresponsable "car elle touche aussi les propriétaires modestes et les locataires car les baux de location subiront de fait une hausse”, les répercussions économiques et le fait que ce sera un frein aux travaux de rénovation énergétique des logements.

... APRÈS AVOIR VOTÉ LA HAUSSE

Il faut bien avoir en tête que les 7 qui reprennent désormais ces arguments ont tous voté la hausse massive d'impôts souhaitée par Eric Piolle. Ils souhaitaient en effet éviter de se faire exclure de la majorité (d'aucuns diraient que les indemnités d'adjoints et de conseillers délégués sont plus confortables que celles d'élus d'opposition) et s'étaient donc contentés d'émettre des réserves sur l'augmentation avant de joindre leurs votes à ceux de leurs collègues. Raté : Eric Piolle les avait dégagé fissa pour avoir osé toussoter. La défaite et le déshonneur. 

LES EXCLUS NE PARLENT PAS DES CAUSES...

Il est par ailleurs toujours aisé de critiquer et même de réclamer une baisse d'impôts de 10% comme le fait Maxence Alloto. Mais le groupe des exclus n'ose pas parler des causes de cette hausse. Poids écrasant des dépenses de fonctionnement qu'on alourdit sans cesse (encore au dernier conseil avec +3,5 millions annuels pour créer 66 postes supplémentaires !), retards pour la mutualisation des services (ville et métro se déchirent même sur la gestion commune des arbres), dépenses futiles (une école du vélo à 1,2 millions d'euros...) et dont on pourrait se dispenser avec un minimum d'organisation et de dialogue (multiples procédures juridiques que l'on pourrait éviter comme celle du restaurant du musée), coût de l'insécurité (6 millions provisionnés pour indemniser l'entreprise brulée suite à l'incendie d'un camp sur un terrain municipal)... Seul le groupe d'Alain Carignon alerte sur les raisons de l'augmentation et rappelle sans cesse que sans réformes de structure pour des économies durables, les mêmes causes produiront les mêmes effets et la hausse ne sera pas la dernière.

En 2 minutes sur TéléGrenoble, Alain Carignon explique comment nous en sommes arrivés à cette augmentation d'impôts.

... QU'HAKIM SABRI (VERTS/ADES) A ENTRETENU PENDANT 8 ANS

On comprend facilement le silence des exclus sur les causes : Hakim Sabri, l'un d'entre eux, a été rien de moins que l'adjoint aux finances pendant 8 ans, de 2014 à 2022. Il a beau jeu de dénoncer la hausse et d'aujourd'hui fustiger "le système Piolle", mais on ne l'entendra pas parler des raisons de cette augmentation puisqu'il a porté et défendu publiquement 8 budgets portant en eux les germes du mal qui conduisent à faire de Grenoble la capitale de l'impôt.

Hakim Sabri, adjoint aux finances de 2014 à 2022 et désormais critique de la hausse d'impôts et du "plan de sauvegarde" (un plan d'austérité) de 2016.

"UN HOLD-UP DÉMOCRATIQUE" COUVERT PAR PASCAL CLOUAIRE (FAUX RÉSEAU CITOYEN)

Ils dénoncent en revanche dans leur tract “un hold-up démocratique car une hausse d’une telle ampleur aurait demandé une consultation citoyenne”. On retrouve un peu la même hypocrisie du côté d'un autre exclu, Pascal Clouaire. Caution "réseau citoyen" de Piolle (un groupe créé pour donner un vernis société civile aux verts), héraut de la "démocratie locale" à la grenobloise, il a été l'élu en charge de toutes les opérations de création d'usines à gaz donnant l'illusion de la participation citoyenne, et éloignant en réalité les habitants de la décision. 

Pascal Clouaire ici avec Raymond Avrillier, Eric Piolle, Olivier Bertrand. Il dénonce désormais un "hold-up démocratique".

PRÉOCCUPÉS PAR LA SÉCURITÉ ET LA PROPRETÉ !

Les exclus vont plus loin et osent une sortie particulièrement audacieuse dans le Dauphiné : "la ville est-elle plus sûre, plus propre ? Non. Oh, on sait bien que pour Éric Piolle, quand on est de gauche, il ne faudrait pas parler de sécurité et de propreté, mais nous, on est de gauche et on sait que cela préoccupe les habitants". Reprenant mot pour mot une formule martelée par le groupe d'opposition à propos de la hausse ("la ville ne sera ni plus propre ni plus sûre"), les voilà désormais conscients que la sécurité et la propreté sont un sujet pour les Grenoblois !

ILS N'AURAIENT RIEN DIT S'ILS N'AVAIENT PAS ÉTÉ EXCLUS

Bien sûr, ils n'auraient rien dit s'ils n'avaient pas été exclus de la majorité. Ils n'auraient plus parlé de cette hausse d'impôts et de ses conséquences, et ils n'auraient jamais osé parler des sujets de la sécurité et de la propreté de la ville, qu'Eric Piolle se refuse de traiter et même d'aborder. Ils auraient continué de voter et de s'exprimer contre leurs convictions, qu'ils peuvent désormais développer maintenant que la liberté de parole leur a été rendue.

S'ils n'avaient pas été exclus, le groupe des 7 n'aurait jamais osé s'exprimer sur tous ces sujets.

D'AUTRES ÉLUS DE LA MAJORITÉ DANS LE MÊME CAS ?

Combien d'autres élus Piollistes sont dans le même cas, parmi ceux que l'on n'entend jamais, qui votent comme on leur dit de le faire (le livre d'une ancienne élue dénonce ce flicage systématique des élus) au mépris de ce qu'ils pensent ? Certains ont beau être excédés par les méthodes et orientations du Maire, ils restent par peur de la brutalité de ce système lorsqu'il se déchaine. D'autres pour le confort des indemnités. Eric Piolle en a rattrapé certains, proches de partir, avec des petites promotions (en promouvant une conseillère déléguée au poste d'adjointe par exemple : quand bien même elle n'éprouve aucun intérêt pour sa délégation d'adjointe, elle perçoit l'indemnité qui va avec).

UN TRÈS BON SIGNAL POUR L'OPPOSITION QUI A ÉTÉ CONSTANTE

La campagne du groupe d'exclus est en tout cas un très bon signal. Ils reprennent et valident les arguments mis sur la table depuis des années par l'opposition. Ils y apportent la caution "d'anciens de Piolle", ce qui prouve bien que ces thèmes ne sont pas une lubie isolée mais touchent très largement. Ce faisant, ils participent au changement de climat politique à Grenoble, à cette bascule qui s'accélère avec la condamnation du Maire et le rétrécissement de sa majorité et de son influence. Et ils apportent surtout de l'eau au moulin du groupe d'Alain Carignon, qui a le double avantage de la constance sur tous ces sujets (son discours n'a jamais varié) et d'un temps d'avance sur les propositions (le groupe développe un plan d'économies et de redressement à chaque conseil). À moins de deux ans et demi de la fin des années Piolle, l'opposition se trouve renforcée : une raison de se réjouir et d'espérer. 

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