PIOLLE VEUT ÊTRE PRÉSIDENT… MAIS DE QUOI ?

Sur France 3 puis dans le Dauphiné (8 mai 2023), Eric Piolle réaffirme qu'il ne briguera pas un troisième mandat à la tête de Grenoble.

LES EUROPÉENNES ÉCARTÉES

Interrogé par des habitants sur FR3 à propos de ses ambitions personnelles, il a commencé par écarter une potentielle candidature aux élections européennes. Cette ambition de devenir Député européen était régulièrement évoquée jusque-là, après l'échec retentissant de son aventure présidentielle en 2021 (il avait fini avant-dernier de la primaire écolo). Comme une petite porte de sortie nationale en lot de consolation.

Piolle avait été largement désavoué par les verts lors de la primaire EELV. De quoi revoir ses ambitions à la baisse ?

ÉCARTÉ PAR LES ÉTATS-MAJORS ?

En réalité, et notre collectif l'a déjà évoqué plusieurs fois, il y a de fortes chances qu'Eric Piolle ait tout simplement été écarté des européennes. Son nom était rapidement sorti de ceux pressentis pour conduire la liste EELV (au profit de David Cormand, Marie Toussaint ou Mégalie Vogel, cités par le JDD en mars dernier : question notoriété Eric Piolle passe donc derrière ces quasi inconnus). Majorité désormais explosée, recordman des impôts locaux, affaires judiciaires... L'image du Maire de Grenoble ne cesse de se ternir. Mais la fin des ambitions européennes remonte très probablement à l'épisode du burkini, il y a tout juste un an : en tentant d'autoriser ce vêtement dans les piscines grenobloises, Eric Piolle avait alors embarassé tous les patrons d'états-majors de gauche avec cette mesure ultra clivante, et ce au beau milieu des élections législatives. 

LE PLAN ORIGINEL EST REMANIÉ

En février dernier, l'ancien conseiller spécial Enzo Lesourt (l'ancien "deuxième cerveau" de Piolle avec qui il est désormais en procès) dévoilait dans le Dauphiné le plan originel : "gagner en 2014, confirmer en 2020 et passer le relais en 2024 pour mettre le pied à l’étrier au maire suivant". Mais le voilà qui confirme désormais qu'il restera Maire de Grenoble jusqu'au bout du mandat, soit 2026. Incapable de lâcher comme c'était pourtant prévu. Voilà qui donne plus de corps à la critique formulée par Enzo Lesourt dans son interview : il a cru "qu’il prendrait le pouvoir sans être pris par lui, ce que nous reprochions à la social-démocratie". Eric Piolle a bien été happé par le pouvoir et n'arrive pas à en décrocher.

« Ce n’est pas l’homme de l’ombre d’Eric Piolle. C’est son ombre tout court. Il l’accompagne du matin au soir dans ses déplacements publics » estimait Rue89Lyon dans un portrait daté de 2016. Depuis le départ d'E. Lesourt, Eric Piolle est orphelin stratégiquement et court comme un canard sans tête.

LA PROMESSE DE NE PAS SE REPRÉSENTER

Dans les médias locaux cette semaine, il réaffirme tout de même qu'il ne briguera pas un troisième mandat de Maire. "Il y aura une autre tête de liste en 2026" explique-t-il à France 3. "Je ne serai pas tête de liste dans trois ans", confirme-t-il au Dauphiné. Il serait bien mal avisé de s'en réjouir : Eric Piolle a rompu suffisamment de promesses pour se permettre aussi de rompre celle-là si ses circonstances personnelles venaient à changer.

LA GUERRE DE SUCCESSION COMMENCE

La première question qui se pose est donc celle du successeur qui sera désigné pour conduire la liste de l'actuelle majorité. Épineuse question, tant personne ne semble sortir du lot pour le moment. Et le nombre de prétendants s'amenuise à mesure que la majorité se réduit. Pascal Clouaire et Maxence Alloto se verraient bien tous deux en haut de l'affiche, c'est de notoriété publique. Mais ils ont été exclus de la majorité pour ne pas avoir voté le budget, et auront donc bien des peines à exister dans un espace politique déjà très occupé (celui de la gauche qui veut faire quasi tout comme Piolle mais sans Piolle).

LES DÉMONÉTISÉS

Quelques noms étaient évoqués par le passé, mais ne semblent plus d'actualité pour la succession. Maud Tavel (EELV), ex égérie de Piolle et adjointe à la "tranquillité publique", se met en retrait car usée par le Maire qui lui a promis monts et merveilles (la Région, la métro...) mais ne lui a rien obtenu. L'autre égérie, Yann Mongaburu (EELV), a disparu des écrans radars après son échec cuisant à la métropole. Elisa Martin (LFI), l'ancienne première adjointe, est devenue complètement invisible depuis qu'elle a été recasée Députée. Les vieux piliers du système (Vincent Fristot, Christine Garnier, Olivier Bertrand...) sont dépassés par les plus jeunes de l'équipe et n'ont de toute façon jamais cherché la lumière alors qu'ils sont aux manettes depuis 25 ans. La première adjointe, Isabelle Peters (PCF), est transparente et n'a obtenu ce poste que parce qu'elle est issue d'une formation politique minoritaire dans la majorité, qui permettait de contenter tant LFI qu'EELV.

LES SECTAIRES

En zélés propagandistes de la majorité, on pourrait penser à d'autres noms comme Lucille Lheureux, l'adjointe à la culture prête à toutes les compromissions et tous les reniements avec une mauvaise foi impressionnante pour défendre leur système. Ou comme Gilles Namur, adjoint aux espaces publics envoyé au front pour répéter les éléments de langage à toutes les réunions d'habitants. Mais les deux brillent par leur sectarisme sans bornes et auraient bien des difficultés à émerger comme tête de liste, rôle qui nécessite d'être davantage consensuel.

LES JEUNES LOUPS

D'autres noms semblent plus crédibles. Anne-Sophie Olmos, Vice-Présidente de la métro en charge de l'eau et jusque-là vraie godillot du Piollisme, était ainsi évoquée par Eve Moulinier dans le Dauphiné du 19 mars. Elle souffre néanmoins d'un manque certain de notoriété et s'est également mise en retrait, lassée par Eric Piolle et ses méthodes (elle ne s'en cache pas auprès de ses proches). Deux noms semblent tenir le haut de l'affiche de cette querelle de succession : Alan Confesson (adjoint du secteur 2) pour La France Insoumise, rongé par l'ambition, et qui n'a fait que de la politique toute sa vie. Et Margot Belair (adjointe à l'urbanisme) pour EELV, qui elle aussi ne vit que pour la politique (y compris dans sa vie personnelle : son concubin est le conseiller départemental EELV qui a fait l'actualité avec une affaire de marchés du CCAS, Jérôme Cucarollo). Les deux sont jeunes et donneraient donc l'illusion du renouvellement alors qu'ils sont de zélés roquets continueurs du système Piolle. Et les deux sont de vrais apparatchiks de leurs formations politiques respectives. Reste à voir qui des deux bébés tirerait son épingle du jeu, et qui de EELV ou LFI remporterait le bras de fer.

PIOLLE ORGANISE LE CHAOS ?

Il n'est pas exclu qu'Eric Piolle organise lui-même le chaos de la succession, flattant les uns et les autres pour entretenir les ambitions, pour que chacun se neutralise et aucun n'émerge. Il explique d'ailleurs au Dauphiné qu'il n'adoubera personne. Ce qui lui permettrait de se ménager une fenêtre pour briguer un troisième mandat de Maire si il change d'avis, en expliquant qu'aucun successeur ne s'est démarqué donc qu'il rempile. Une vieille ficelle, et le personnage est assez vicieux pour l'utiliser.

PRÉSIDENCE DE LA RÉPUBLIQUE...

Interrogé sur ses ambitions présidentielles en 2027, Eric Piolle laisse là-aussi la porte ouverte. "Moi je n'exclus rien". Il explique qu'il faudra travailler en équipe et voir qui est le mieux placé. Mais considère "avoir une voix sur la scène nationale parce que j’ai un message à porter". La défaite aux primaires des verts ne l'a pas vacciné, il se voit encore à l'Elysée en dépit de tout bon sens. Certes, la nouvelle patronne d'EELV Marine Tondelier était sa directrice de campagne à ces mêmes primaires et il a réussi à placer Olivier Bertrand au bureau national des écolos pour y faire valoir ses intérêts. Mais le Maire de Grenoble manque de notoriété nationale (ou a une très mauvaise image vue comment les non Grenoblois perçoivent ce qu'il a fait de la ville) et a finalement peu de poids à gauche, très en retard sur des cadors qui occupent déjà l'espace médiatique disponible et ne manquent pas d'ambition eux aussi.

... OU DE LA MÉTROPOLE ?

Un plan de secours se dessine petit à petit et semble cousu de fil blanc. Dernièrement, on assiste à un fort regain d'activité d'Eric Piolle à la Métropole alors qu'il intervenait assez peu. Il s'est également rendu aux cérémonies de voeux de plusieurs communes de l'agglomération, alors qu'il ne l'avait jamais fait jusque-là. Et dans ses déclarations à France 3 et au Dauphiné, il explique simplement qu'il ne sera pas tête de liste. Il laisse donc la porte ouverte à la possibilité de figurer sur la liste... pour être élu conseiller métropolitain, et donc potentiellement briguer la tête de la Métropole. Manière de laver l'affront de la défaite de Mongaburu face à Christophe Ferrari, lui qui est incapable d'accepter l'échec et est persuadé que tout lui réussit. Ou ultime plan de repli d'un élu en fin de carrière incapable de décrocher de l'addiction du pouvoir. Ou, très probablement, un mélange des deux.

Christophe Ferrari (PS repenti), Eric Piolle : et si la division de la majorité métropolitaine aujourd'hui préfigurait une guerre totale pour la succession à la tête de la Métro ?

LA FIN DU SYSTÈME

Quoi qu'il en soit, ces considérations politiciennes sont bien éloignées du quotidien que vivent les Grenoblois. Ils attendent des solutions, et surtout des actes aux maux qui rongent la ville. Pas d'assister au petit théâtre des ambitions des uns et des autres, engoncés dans des petits calculs et ivres d'égo et d'ambition. Ce travail de réflexion et de propositions pour le Grenoble de demain a déjà été engagé par le groupe d'opposition présidé par Alain Carignon. Loin de ceux qui ne pensent qu'espace politique et arrangements de boutiquier. Avec comme seule question : "que faire, et comment le faire ?". Tout un programme.

6 Comments

Laisser un commentaire

"LES INFORMÉS" : LES COULISSES DE LA VIE GRENOBLOISE !

X