UN TROU DE 100 MILLIONS D’EUROS À LA MÉTRO… ET UN SIÈGE À 108 MILLIONS

Le conseil métropolitain de ce vendredi 31 mai s'est ouvert par l'étude d'une délibération sur le projet de construction de nouveau siège métropolitain, qui voit ses coûts exploser à plus de 100 millions d'euros... alors que la métropole, exsangue, doit justement trouver 100 millions d'euros d'économies dans les deux ans !

UN PROJET À 46 MILLIONS, PUIS 86 MILLIONS...

Lancé en 2017 par la majorité Ferrari/Piolle qui vivait à l'époque une idylle, le projet originel devait coûter 46 millions d'euros. À peine deux ans plus tard, en 2019, le prix avait déjà presque doublé, passant à 86 millions d'euros. Mais pas d'inquiétude : Michelle Veyret (communiste), la 1ère Vice-Présidente en charge du patrimoine suivant le dossier, assurait qu'avec ces dépenses, ils avaient tout prévu. 

Vue d'architecte du projet de siège.

... POUR FINIR À 108 MILLIONS !

Comme d'habitude, les assertions des phares de l'humanité n'engagent que ceux qui y croient. Car moins de 5 ans plus tard, la note s'est encore alourdie : nous en sommes désormais à 108 millions d'euros ! Qu'ils sont loin, les 46 millions de 2017. Jean-Benoit Vigny pointe à juste titre dans son article pour le Dauphiné Libéré que "le projet initial subit donc une hausse, en sept ans, de 134 % (contre 20 % d’inflation dans le même laps de temps)". Ceux qui croient aux promesses sur Grenoble en 2040 de la majorité Verte/LFI devraient tirer la leçon de cette catastrophe en termes de capacité d'anticipation. 

UN PROJET ANACHRONIQUE

108 millions pour un projet qui n'a pas évolué dans sa conception. Pour un projet qui n'a à aucun moment pris en compte l'évolution des pratiques accélérée par le covid, avec les réunions en visioconférence, le développement du télétravail... Et qui s'avère complètement anachronique, avec une centralisation dans un méga-siège à rebours de toute logique de décentralisation des services et de proximité. Un projet qui a 40 ans de retard.

Le siège actuellement.

MICHEL SAVIN (LR) : "ON NOUS PREND POUR DES IMBÉCILES"

Le Président du groupe d'opposition droite et centre, Dominique Escaron, a vivement fustigé cette lubie en se demandant si après avoir plus que doublé les coûts on va finir par les quadrupler. Son collègue Michel Savin (élu de Domène, Sénateur LR) a abondé dans le même sens, rappelant avoir déjà vécu cette situation avec le stade des Alpes (initialement présenté comme moins coûteux qu'un projet alternatif à Saint-Martin d'Hères, puis finir 2 à 3x plus cher avec une explosion des coûts). Alors qu'on reproduit les mêmes schémas, "on nous prend pour des imbéciles et c'est une habitude au sein de cet hémicycle" a-t-il lancé à l'adresse de la majorité.

ALAIN CARIGNON : "CETTE CATASTROPHE ANNONCÉE EST VOTRE OEUVRE COMMUNE"

Le Président du groupe d'opposition Alain Carignon a lui rappelé à l'intention des Roses/Verts/LFI que "cette catastrophe annoncée est bien votre oeuvre commune". Il est revenu sur les critiques de la chambre régionale des comptes elle-même, qui, alors qu'il ne coûtait "que" 86 millions avait dénoncé un projet qui pèserait trop lourdement sur les finances et dont les gains annuels en dépenses de fonctionnement deviendraient éventuellement supérieurs aux dépenses après... 22 ans. Avec +22 millions de surcoût, on s'éloigne encore un peu plus de cette projection déjà très hypothétique.

L'HYPOCRISIE À TOUS LES ÉTAGES

Il a également soulevé l'hypocrisie consistant à prôner le sud Grenoble comme "nouvelle centralité" de la métropole... tout en construisant le siège des élus dans le centre. Ou encore sur le fait que la majorité assure qu'elle ne pouvait pas pouvoir prévoir l'explosion des coûts quand dans le même temps elle affirme avec certitude que ce batiment répondra aux besoins pour les 60 prochaines années... Idem pour le stationnement : "il va falloir expliquer aux habitants de Washington, de Jeanne d'Arc, du Cours de la Libération, de la rue de Strasbourg, etc., que les mêmes élus qui leur refusent 20, 30, 40 places se font un projet qui prévoit un parking de 500 places" ! Faites ce qu'on dit, pas ce qu'on fait.

UNE ORGANISATION PLUS SOUPLE EST POSSIBLE

Il a fustigé un projet rigide, alors que l'heure est à la souplesse et que de nombreux locaux ville/métro non utilisés pourraient accueillir les services pour un coût de réhabilitation bien moindre (de l'ordre de 50% moins cher) que la construction du nouveau siège ! Et ce alors qu'on pourrait même tirer profit de la vente du siège actuel avec une recette chiffrée entre 13 et 18 millions d'euros. Mais ça ne rentre pas dans le logiciel des dinosaures dépensiers de la majorité.

100 MILLIONS D'ÉCONOMIES À TROUVER D'ICI 2026 !

Alain Carignon a enfin appelé à tenir compte "de la nouvelle donne financière, de l'évolution des pratiques, des besoins des populations". "Nouvelle donne financière" car il a révélé que la majorité est aujourd'hui à la recherche de 100 millions d'économies sur les investissements dans les deux ans pour pouvoir simplement terminer le mandat. Des coupes considérables vont impacter nombre de politiques publiques qui profitent aux habitants, sans qu'on sache lesquelles (les élus rose/rouge/verts ne seraient tombés d'accords que sur 30 millions d'économies pour l'instant), et pendant ce temps, alors qu'on pourrait économiser sur l'investissement le plus inutile de tous, on entérine le méga siège à 108 millions !

MICHELLE VEYRET (PCF) TENTE DE DÉFENDRE PITEUSEMENT LE MORCEAU

À la manœuvre pour tenter de défendre le projet : la 1ère Vice-Présidente Michelle Veyret (PCF) qui n'a guère brillé. Elle n'a répondu à aucune des critiques de fond sur les finances et les alternatives possibles, a tenté de faire croire que le président du groupe d'opposition serait dans "l'exagération" (alors que les chiffres ne mentent pas) et se prendrait pour un "chevalier blanc" tout en répétant que ses arguments seraient "faiblards" et "confus"... sans jamais en développer un seul elle-même. Il suffisait de l'écouter répondre pour rapidement comprendre qui est au niveau et qui ne l'est pas. 

La 1ère Vice-Présidente Michelle Veyret.

LE SEMI AVEU DE LA 1ÈRE VICE-PRÉSIDENTE

Malgré plusieurs relances, y compris au moment du vote du compte administratif 2023, Alain Carignon n'a par ailleurs obtenu aucune réponse sur les 100 millions de trou et sur quels investissements vont faire les frais du sabrage budgétaire. Michelle Veyret, avec toute la sécheresse et la mauvaise foi dont sont capables les communistes, se contentant finalement d'expliquer qu'un "travail est en cours" : un semi-aveu lourd de conséquences car cela signifie que malgré les 100 millions à trouver dans l'urgence, la majorité persiste en connaissance de cause avec son siège dispendieux.

LE CAMP FERRARI PERSISTE ET SIGNE

On ne trouvait finalement que les élus fidèles à Christophe Ferrari pour défendre mordicus ce qui achève d'emmener les finances de l'intercommunalité dans le mur. Ceux-ci n'ont pas lésiné sur les éléments de langage : Souad Grand, adjointe du Maire de Pont de Claix (un certain.. Christophe Ferrari) osant même parler d'une "grande avancée" pour les élus, les agents et... les habitants (!) ou encore de "projet innovant et ambitieux pour les métropolitains". Nul doute que ces derniers attendaient avec impatience une dépense de 108 millions qui n'améliorera absolument rien à leur vie dans la métropole.

LES RIDICULES CONTORSIONS DES PIOLLISTES...

Ce dossier permet également de mesurer une nouvelle fois le niveau de politicaillerie des élus Piollistes. En 2017, en 2019, ils étaient tout à fait pour. Puis en 2021, par la voix de Francis Dietrich (Maire Vert de Champ-sur-Drac), ils parlent alors de "49-3" et de "coup de force" pour le dénoncer. Une habitude chez eux : ils lancent des projets (coûteux) et se retournent contre par pures considérations politiciennes, parce qu'ils sont en guérilla contre la majorité Ferrari/Laval à laquelle ils sont censés appartenir (un exemple éclatant de ces retournements de veste qui nuisent à la métropole étant le métrocable).

... QUI AURONT PRIS TOUTES LES POSITIONS POSSIBLES

Après avoir été pour, puis contre, ils ont encore opéré une mue hier par la voix de Lionel Coiffard, le coprésident du groupe Verts/LFI. Les voilà, en résumé, désormais "ni tout à fait pour ni tout à fait contre, mais". Il a en effet expliquer que son groupe s'abstiendrait, car il est pour la construction de siège mais veut maintenant une étude d'impact sur les conséquences de cet investissement... Le Vice-Président reconnaissant la "difficulté collective dans la capacité à anticiper" de sa majorité... C'est le moins qu'on puisse dire mais il s'agirait d'en tirer les conséquences ?

Lionel Coiffard, Vice Président Verts/Piolliste de la Métro et coprésident de leur groupe.

LA DÉLIBÉRATION PASSE GRÂCE AUX VERTS/LFI

Grâce à cette abstention, l'enveloppe financière de 108 millions a été validée par 57 voix pour (les groupes des socialistes, communistes, des petites communes), 28 contre (les oppositions) et 33 abstention (les Verts/LFI). Ces derniers peuvent donc gesticuler comme ils le veulent : ils sont doublement responsables de cette énorme gabegie, d'abord en participant à impulser le projet, et ensuite par leur lâcheté abstentionniste alors que leurs voix aurait permis de le stopper.

LA MÉTROPOLE VA DANS LE MUR

De tels chiffres peuvent paraitre abstraits tant ils sont stratosphériques mais mis en parallèle ils mettent bien en évidence la trajectoire mortifère de la métropole : pendant qu'on jette 108 millions par les fenêtres pour un siège dont on pourrait se passer en faisant mieux pour moins cher, il manque 100 million d'euros pour terminer le mandat et ce sont des investissements utiles, eux, aux métropolitains qui vont subir les économies. 

La situation de la métro est à mettre en parallèle avec celle de la ville. Dette abyssale, dépenses de fonctionnement étouffantes, argent jeté par les fenêtres dans des investissements dispensables... et les coupes budgétaires à venir ne sont pas sans rappeler le plan d'austérité d'Eric Piolle pendant son premier mandat. On connait la suite à Grenoble : en l'absence de réforme de structure les indicateurs financiers ont continué de se dégrader jusqu'à la funeste augmentation d'impôts... qui elle-même ne permet de tenir que temporairement et renvoie à demain de nouvelles mesures difficiles.

Alain Carignon l'a rappelé en conclusion de ses interventions : "la mutualisation est le fondement des problématiques de la ville centre et de la métropole". C'est en effet la seule voie pour générer de grosses économies de fonctionnement qui sortent les deux collectivités de l'ornière et évite les augmentations d'impôts qui seront sinon inéluctables. Les Grenoblois et les métropolitains sont prévenus.

 

 

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