L’OPACITÉ DE GESTION DU PATRIMOINE GRENOBLOIS

En décembre, le dernier conseil municipal de l'année voyait passer une délibération actant le choix de la majorité municipale de confier la chapelle des pénitents, rue Voltaire, à un opérateur choisi dans le cadre des fameux appels à projets « Gren’ de projets ».

LA VILLE INCAPABLE D'ENTRETENIR LA CHAPELLE DES PÉNITENTS

Très dégradée, à l'image de nombreux autres édifices patrimoniaux grenoblois propriété de la ville, la chapelle des pénitents était à l'abandon depuis des années, fermée au public malgré un superbe mobilier méconnu. Incapable d'en assurer une restauration directe car exsangue financièrement, sans un sou pour le patrimoine, la municipalité a lancé un "appel à projets" pour trouver un opérateur qui se charge d'en faire quelque chose à sa place.

L'entrée de la chapelle des pénitents, rue Voltaire.

GRENOBLE LAB SÉLECTIONNÉ

"Appel à projets" et non pas appel d'offres, ce qui permet aux élus de choisir qui ils souhaitent sans véritables critères établis. Ainsi dans le cas de cette chapelle, trois prétendants avaient d'abord répondu à l'appel lancé par la ville. L'un d'eux a jeté l'éponge en cours de procédure, ne parvenant pas à atteindre une viabilité économique pour son projet. Sur les deux concurrents restants (GrenobLE LAB et La Maison des Pas… Que), c'est GrenobLE LAB qui s'est vu confier l'édifice. 

UNE ÉBAUCHE DE PROJET TRÈS VAGUE

La note annexée à la délibération détaillant le projet est très vague. GrenobLE LAB est une association "tiers-lieu pépinière de projets autour du durable, local et circulaire". Pour la chapelle, elle envisage "une rénovation dans le respect et la sobriété, redonnant son aura à cet espace , modernisant son accès, tout en l'ouvrant à tous les publics, citoyens et professionnels pour se rencontrer, travailler, échanger, commercer, s’émerveiller, écouter, partager… Avec une gouvernance collégiale innovante, agile et vigilante sur le respect des équilibres sociaux, environnementaux et… financiers !". 

UNE SÉLECTION DANS L'OPACITÉ

Une prose qui ne nous avance pas beaucoup. Quelles que soient les bonnes intentions de l'association, qui va donc se voir accorder un bail emphytéotique (de 50 ans !) pour un bien grenoblois très important, le problème réside dans l'opacité de sélection. D'une part, pas une seule fois les Grenoblois n'ont été consultés pour savoir si cela leur convenait qu'un élément patrimonial de la ville ne soit confié à un tiers. D'autre, part le jury de sélection de "l'appel à projets" ne comportait que des élus de la majorité, aucun de l'opposition, tout comme le comité de suivi mis en place par la délibération. 

L'intérieur de la chapelle.

UN SOUTIEN D'ERIC PIOLLE LAURÉAT

Mieux encore : la majorité municipale revendique ce fonctionnement opaque et assume ne pas vouloir d'élu de l'opposition dans le processus. Malgré la présence de personnalités qualifiées dans le jury, cette absence de "garde-fous" est la porte ouverte à toutes les interprétations. Ainsi que penser du fait que la coporteuse du projet de la chapelle pour GrenobLE LAB, Fabienne Warin, figurait parmi la liste des soutiens d'Eric Piolle en 2020 ?

UNE "PETITE AFFAIRE ENTRE AMIS"...

On peut être d'autant plus circonspects que les élus Piollistes sont des habitués des petites faveurs aux amis. En octobre dernier, la municipalité a été condamnée suite au recours de deux anciens conseillers municipaux, Guy Tuscher et Bernadette Richard-Finot. Ils avaient attaqué la cession d'un terrain par la ville, à un prix très inférieur au marché, à deux familles "d’une catégorie sociologiquement proche de cette majorité municipale. Peut-être même des amis à des adjoints" selon les termes de Guy Tuscher. Le tribunal leur a donné raison. Une « petite affaire entre amis », avait dénoncé le rapporteur public.

... QUI N'EST PAS ISOLÉE

Il y avait déjà eu un précédent similaire pour la vente, Quai Perrière, d'un terrain de 50m2 à un prix dérisoire à une personnalité grenobloise, Pierre Rostaing, soutien public des Verts/LFI. Comment ne pas citer également le Maire Eric Piolle lui-même condamné pour favoritisme pour l'attribution de marchés sans appel d'offres à l'association Fusées qui avait participé à sa campagne électorale. Ou l'adjoint Claus Habfast récemment condamné pour favoritisme également pour sa gestion d'Alpexpo à l'époque. 

Une enquête a également été ouverte en 2023 pour "soupçons de favoritisme" pour des marchés sans appel d'offres entre le CCAS de la ville et la société de transport Toutenvélo présidée par Jérôme Cucarollo, élu Vert au département, ici aux côtés de son suppléant, l'élu grenoblois apparatchik des Verts/ADES Olivier Bertrand.

CES APPELS À PROJETS AU POINT MORT

Autre problème avec les "appels à projets" municipaux : la légèreté du mode de sélection conduit à choisir des bénéficiaires qui ne vont pas jusqu'au bout des travaux promis. À ce jour seul le "Minimistan", au couvent des minimes, a abouti. Le projet de tiers-lieu (là encore) pour la villa Clément, au point mort depuis 2017, n'est pas près d'avancer puisque l'une des trois associations constituant le collectif a jeté l'éponge en fin d'année dernière. Si les travaux pour l'orangerie semblent enfin avoir débuté (petit miracle à quelques mois des municipales), le bâtiment sera resté en friche près de 10 ans depuis son attribution.

LE PROJET IRA-T-IL AU BOUT ?

Et pour la chapelle des pénitents, on est aussi en droit de se demander si le projet ira au bout. Les travaux sont estimés à 1 million d'euros. Le Dauphiné Libéré annonce que GrenobLE LAB en financera 20%, mais il restera 800 000 euros à trouver. L'association entend avoir recours au financement participatif. Il faut donc désormais que le projet trouve son public de financeurs sous peine de finir comme l'orangerie ou la villa Clément...

En conseil municipal, l'intervention de Charah Bentaleb, élue d'opposition du groupe d'Alain Carignon, à propos de l'opacité pour l'attribution de la chapelle des pénitents.

EN FINIR AVEC LES "APPELS À PROJETS"

Ces "appels à projets" aux critères indéfinis, où une poignée d'élus de la majorité peuvent décider du devenir du patrimoine grenoblois sans rendre de compte, qui aboutissent à choisir des opérateurs le plus souvent associatif qui ont de grandes difficultés à supporter la charge de travaux lourds et coûteux, ont montré toutes leurs limites. Mais les Verts/LFI persistent et signent avec ce fonctionnement alors qu'un  retour aux appels d'offres ouverts et transparents éviterait toutes ces failles. 

 

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