LÉGISLATIVES À GRENOBLE : L’EFFONDREMENT DU CAMP PRÉSIDENTIEL

Posted On 1 juillet 2024

Les élections législatives anticipées suite à la dissolution surprise répondent à un contexte particulier, avec des enjeux nationaux qui ont mobilisé les électeurs. Mais ils permettent aussi de tirer des enseignements sur les rapports de force locaux.

SUR LA 1ÈRE CIRCONSCRIPTION, OLIVIER VÉRAN CHUTE

Grenoble est à cheval sur deux circonscriptions. Sur la 1ère (qui comprend en plus de la moitié de la ville-centre, plusieurs communes du Grésivaudan), le Député sortant Olivier Véran (Macroniste) obtenait en 2022 au 1er tour 40,5% des voix et la candidate de la gauche unie 36,8%. Hier, la gauche est passée à plus de 40% et Olivier Véran tombe à 33%, soit -7 points par rapport à il y a deux ans. 

À GRENOBLE, LE RÉTRÉCISSEMENT DE SON SOCLE

À Grenoble, l'ex Ministre ex futur médecin esthétique subit la même chute et voit son socle se tasser encore. Il passe de 32% au 1er tour en 2022 à 25%. La gauche passe elle de 48 à 52%, qu'on peut imputer à une meilleure mobilisation nationale de l'électorat urbain par peur de l'arrivée au pouvoir du RN.

LE RN MONTE EN FLÈCHE, LR SE MAINTIENT

Mais c'est le RN qui crève les plafonds, passant de 7% sur la circo en 2022 à plus de 18% hier. Du jamais vu sur ce territoire. De son côté, Nathalie Béranger (LR) préserve le socle des Républicains (7%) améliorant même le score du parti par rapport à 2022, témoignage malgré des vents nationaux très défavorables de la solidité de son implantation de conseillère régionale, conseillère municipale de Grenoble dans le groupe société civile d'Alain Carignon. 

VÉRAN EN DANGER DE MORT POLITIQUE

Avec son score, le RN se qualifie au second tour qui prendra donc la forme d'une triangulaire. Par conséquence, Olivier Véran ne pourra pas bénéficier d'un report de voix conséquent qui lui avait permis de creuser l'écart en 2022... et ce alors qu'il accuse 4000 voix de retards sur la gauche (il en avait 2000 d'avance la dernière fois). Dans une semaine, l'ex Ministre pourrait bien devenir également... ex Député.

SUR LA 3ÈME CIRCONSCRIPTION, EMILIE CHALAS ACHÈVE DE SE FAIRE DISTANCER

Sur la 3ème circonscription (autre moitié de Grenoble et la rive gauche du Drac), on assistait au match retour entre Elisa Martin (LFI) et Emilie Chalas (Renaissance). La première avait battu la seconde en 2022, lui faisant perdre son mandat de Députée. Entre 2022 et 2024, le score d'Elisa Martin est resté stable (42%). Mais Emilie Chalas passe de son côté de près de 25% à 20% (de 23 à 18% à Grenoble). Elle qui voulait incarner une troisième voie entre LFI et le RN finit... distancée par les deux (le RN bondit lui de 11 à 22% !).

LE PROBLÈME CHALAS

Pour résumer le problème Chalas : en raison de son manque de travail de terrain et d'implantation, elle fait moins que la base électorale de son camp lorsqu'elle se présente. Et son camp étant de plus en plus faible, l'équation ne va pas en s'arrangeant. Ainsi en 2019 aux européennes, le parti macroniste fait 24% à Grenoble ; l'année suivante, elle fait 13% aux municipales. Combien aux prochaines, celles de 2026, alors que Renaissance a fait 11% aux européennes à Grenoble cette année ? Le potentiel Chalas est très bas. Et sa troisième défaite successive à venir ce dimanche va encore l'affaiblir.

LE CONTEXTE NATIONAL EFFACE LE POIDS DES AFFAIRES

Le plus notable reste finalement le maintien du score d'Elisa Martin qui ne semble pas souffrir outre mesure de l'affaire de rémunérations occultes d'élus dans laquelle elle est mise en cause et qui fait grand bruit. Le contexte national et le vote d'étiquette (de nombreux électeurs cherchaient des bulletins "front populaire" sans même savoir qui est Elisa Martin) l'ont sauvé en occultant les affaires... mais ce n'est que temporaire puisque l'enquête judiciaire débute à peine et promet des rebondissements dans les prochains mois. Les magouilles Piolle/Martin risquent de peser bien plus fort sur les municipales, élection beaucoup plus personnelle et 100% locale.

S. GEMMANI (GIROUETTE) CONFIRME QU'ON NE COPIE COLLE PAS LES VOIX

Autre leçon, cette fois-ci pour Stéphane Gemmani (girouette désormais adhérent PS) qui était candidat dissident se revendiquant de la sociale-démocratie (comme Chalas..) sur la 3ème circo : il récolte 7% des suffrages quand Raphaël Glucksmann (PS-Place Publique) réalisait 18% sur le même secteur il y a trois semaines. Pari raté pour Gemmani : on ne peut pas copier coller les voix des européennes. De quoi donner des sueurs froides à Maxence Alloto qui se voyait déjà en tête à gauche aux municipales sur la base de ces mêmes européennes d'ores et déjà démenties ! L'atterrissage va être difficile pour certains..

LE CAMP PRÉSIDENTIEL NE PORTERA PAS L'ALTERNANCE À GRENOBLE

Globalement, les mêmes dynamiques que celles constatées aux européennes se cristallisent. La gauche même unie, même avec des hausses de participation, atteint un plafond à Grenoble, autour de 50% des voix (dont des électeurs socio-démocrates qui auront le choix avec une ou des listes de gauche différentes de celles des Verts/LFI en 2026). L'opposition grimpe donc à environ 50% également,  avec en son sein un effondrement clair du bloc présidentiel. Ce premier tour des législatives confirme que ceux qui sont issus et/ou se revendiquent du macronisme ne pourront pas porter l'alternance à Grenoble... élargissant de fait le champ d'action du groupe d'Alain Carignon, qui a pris le leadership de l'opposition dès 2020 et ne cesse de renforcer et élargir son assise depuis.

DIMANCHE, UNE NOUVELLE PAGE S'OUVRE

Rendez-vous dimanche prochain pour la suite. Si la défaite d'Emilie Chalas ne fait aucun doute (la troisième après les municipales 2020 et les législatives 2022...), le sort d'Olivier Véran en ballotage défavorable n'est pas encore certain. Dimanche soir prochain, avec le départ de la course de fond à 20 mois des élections municipales, une nouvelle page politique s'apprête à s'ouvrir pour Grenoble.